La Vie Divine 1153 pages 2005 Edition
French Translation
  Cristof Alward-Pitoëff

ABOUT

Sri Aurobindo's principal work of philosophy and metaphysics, expounding a vision of spiritual evolution culminating in the transformation of man from a mental into a supramental being and the advent of a divine life upon earth.

La Vie Divine

Sri Aurobindo symbol
Sri Aurobindo

Sri Aurobindo's principal work of philosophy and metaphysics. In this book, Sri Aurobindo expounds a vision of spiritual evolution culminating in the transformation of man from a mental into a supramental being and the advent of a divine life upon earth. The material first appeared as a series of essays published in the monthly review Arya between 1914 and 1919. They were revised by Sri Aurobindo in 1939 and 1940 for publication as a book.

Sri Aurobindo Birth Centenary Library (SABCL) The Life Divine Vols. 18,19 1070 pages 1970 Edition
English
 PDF    philosophymetaphysics
Sri Aurobindo symbol
Sri Aurobindo

Sri Aurobindo's principal work of philosophy and metaphysics. In this book, Sri Aurobindo expounds a vision of spiritual evolution culminating in the transformation of man from a mental into a supramental being and the advent of a divine life upon earth. The material first appeared as a series of essays published in the monthly review Arya between 1914 and 1919. They were revised by Sri Aurobindo in 1939 and 1940 for publication as a book.

French Translations of books by Sri Aurobindo La Vie Divine 1153 pages 2005 Edition
French Translation
Translator:   Cristof Alward-Pitoëff  PDF    LINK

12

L'origine de l'Ignorance

Par l'énergie de la conscience,¹ le Brahman Se condense; de cela naît la Matière, et de la Matière, la Vie, le Mental et les mondes.

Mundaka Upanishad. 1.1. 8.

Il désira : " Que Je sois Multiple ", il se concentra en Tapas, par le Tapas il créa le monde; le créant, il entra en lui; entrant en lui, il devint l'existant et ce qui est au-delà de l'existence, il devint l'exprimé et le non-exprimé, il devint la connaissance et l'ignorance, il devint la vérité et la fausseté : il devint la vérité et même absolument tout ce qui est. " Cette Vérité ", ainsi l'appellent-ils,

Taittirîya Upanishad. II. 6.

L'énergie de la conscience1,est Brahman.

Taittirîya Upanishad. III.2-5.

 

¹Tapas.

Page 605


Maintenant que tant d'éléments ont été établis, il devient nécessaire et possible de considérer de près le problème de l'Ignorance du point de vue de son origine pragmatique, du processus de conscience qui l'a engendrée. C'est sur la base d'une Unité intégrale conçue comme la vérité de l'existence qu'il nous faut envisager le problème et voir dans quelle mesure les différentes solutions possibles sont applicables sur une telle base. Comment cette multiple ignorance ou cette connaissance étroitement auto-limitative et séparatrice a-t-elle pu apparaître et entrer en action, et poursuivre cette action, dans un Être absolu qui doit être conscience absolue et ne saurait donc être soumis à l'ignorance ? Comment une division, ne fût-elle qu'apparente, peut-elle se produire effectivement et se perpétuer dans l'Indivisible ? Intégralement un, l'Être ne peut être ignorant de lui-même; et toutes choses étant lui-même, étant des modifications, des déterminations conscientes de son être, il ne peut non plus être ignorant des choses, de leur nature et de leur action véritables. Nous disons que nous sommes Cela, que le Jîvâtman ou moi individuel 'n'est autre que le Paramâtman, n'est autre que l'Absolu, et pourtant il est indéniable que nous sommes dans l'ignorance des choses et de nous-mêmes. Il en résulte une contradiction, car ce qui, en sa texture même, devrait être incapable d'ignorance en est cependant capable et s'y est plongé par quelque volonté de son être, ou par quelque nécessité ou possibilité de sa nature. Nous ne réduisons pas la difficulté en alléguant que le Mental, siège de l'ignorance, relève de la Maya, qu'il est non-existant, non-Brahman, et que le Brahman, l'Absolu, l'unique Existence ne peut en aucune manière être touché par l'ignorance du mental qui fait partie de l'être illusoire, Asat, la Non-Existence. C'est là une échappatoire qui ne nous est point ouverte si nous admettons une Unité intégrale; car il est alors évident qu'en faisant une distinction si radicale, et en l'annulant en même temps, la déclarant illusoire, nous

Page 606


utilisons la magie ou la Maya de la pensée et des mots, afin de nous dissimuler le fait que nous divisons et nions l'unité du Brahman ; nous avons, en effet, érigé deux pouvoirs opposés, le Brahman incapable d'illusion et la Maya qui s'illusionne elle-même, et les avons introduits de force dans une unité impossible. Si le Brahman est l'unique existence, la Maya ne peut être qu'un pouvoir du Brahman, une force de sa conscience ou un résultat de son être; et si le Jîvâtman, un avec le Brahman, est soumis à sa propre Maya, alors le Brahman en lui est soumis à la Maya. Mais cela n'est pas intrinsèquement ni fondamentalement possible : la sujétion ne peut être qu'une soumission de. quelque chose dans la Nature à une action de la Nature qui fait partie du mouvement conscient et libre de l'Esprit dans les choses, un jeu de son Omniscience qui se manifeste. L'Ignorance doit faire partie du mouvement de l'Un, être un développement de sa conscience sciemment adopté, et auquel il n'est pas assujetti de force, mais dont il se sert pour son dessein cosmique.

Nous ne saurions nous débarrasser de toute la difficulté en disant que le Jîvâtman et le Suprême ne sont pas Un, mais éternellement différents, l'un étant soumis à l'ignorance, l'autre étant un absolu d'être et de conscience, et donc de connaissance, car cela contredit l'expérience suprême et l'expérience totale qui est celle de l'unité en l'être, quelle que puisse être la différence dans l'action de la Nature. Il est plus facile d'accepter le fait de l'unité dans la différence, qui est si évident et si répandu dans toute la construction de l'univers, et nous contenter d'affirmer que nous sommes un et cependant différents : un en notre être essentiel et donc en notre nature essentielle, différents en notre forme-d'âme et donc en notre nature active. Mais nous ne faisons ainsi que constater le 'fait; la difficulté qu'il soulève n'est pas résolue : comment ce qui, en l'essence de son être, appartient à l'unité de l'Absolu et devrait donc être un avec lui et avec tous en sa conscience, se trouve-t-il divisé en la force dynamique de son moi et en son action et soumis à l'Ignorance ? Notons par ailleurs qu'une telle formulation ne serait pas entièrement vraie, puisque le Jîvâtman a la possibilité de s'unir à la nature active de l'Un, et pas seulement d'entrer dans un état d'union statique essentielle. Ou nous pouvons éluder la difficulté en disant qu'au-delà, ou au-dessus de l'existence et de ses problèmes, il y a l'Inconnaissable qui est au-delà

Page 607


ou au-dessus de notre expérience, et que l'action de la Maya a déjà commencé dans l'Inconnaissable avant le commencement du monde et qu'elle est donc elle-même inconnaissable et inexplicable en sa cause et son origine. Ce serait une sorte d'agnosticisme idéaliste, par opposition à un agnosticisme matérialiste. Mais l'objection à laquelle se heurte tout agnosticisme, c'est que celui-ci n'est peut-être que notre refus de connaître, qu'une adhésion trop prompte à une apparente restriction ou constriction de la conscience dans son état présent, un sentiment d'impuissance que les limitations immédiates du mental peuvent se permettre, mais pas le Jîvâtman qui est un avec le Suprême. Le Suprême doit sûrement se connaître lui-même et connaître la cause de l'ignorance, aussi le Jîvâtman n'a-t-il aucune raison de désespérer d'atteindre jamais la connaissance ou de nier sa capacité de connaître le Suprême intégral et la cause originelle de son ignorance présente.

L'Inconnaissable, si tant est qu'il existe, est peut être un état suprême de Satchidânanda par-delà nos plus hautes conceptions de l'existence, de la conscience et de la félicité; c'est de toute évidence ce que la Taittirîya Upanishad entendait par l'Asat, le Non-Existant, qui, seul, était au commencement et d'où est né l'existant; et c'est peut-être aussi le sens le plus profond du Nirvana du Bouddha, car la dissolution de notre état présent par le Nirvana peut être un moyen d'accéder à quelque état suprême qui dépasse même toute notion Ou toute expérience du moi, une ineffable libération de tout ce que signifie pour nous l'existence. Ou ce peut être la béatitude absolue et inconditionnée dont parle l'Upanishad, qui dépasse toute expression et toute compréhension parce qu'elle se situe bien au-delà de toutes nos conceptions et de toutes nos définitions de la conscience et de l'existence. C'est dans ce sens que nous l'avons déjà accepté, car cette acceptation ne nous engage qu'à refuser de mettre une limite à l'ascension de l'Infini. Ou s'il n'est pas cela, s'il est quelque chose qui diffère complètement de l'existence, même d'une existence inconditionnée, alors ce doit être le Non-Être absolu du penseur nihiliste.

Mais rien ne peut sortir du Néant absolu, pas même une simple apparence, pas même une illusion; et si la Non-Existence absolue n'est pas cela, alors elle ne peut être qu'une Potentialité absolue éternellement irréalisée, un zéro énigmatique de l'Infini d'où peuvent émerger à tout moment des potentialités relatives, mais dont quelques-unes seulement

Page 608


parviennent à prendre une apparence phénoménale. Tout peut surgir de cette Non-Existence, et il est tout à fait impossible de dire quoi ou pourquoi; c'est, en pratique, une graine de chaos absolu d'où, par quelque heureux — ou plutôt malheureux — accident, l'ordre d'un univers a'émergé. Ou bien nous pouvons dire qu'il n'y a pas d'ordre réel de l'univers ; ce que nous prenons pour tel est une habitude persistante des sens et de la vie et une fiction du mental, il est donc inutile de chercher la raison ultime des choses. D'un chaos absolu, tous les paradoxes et toutes les absurdités peuvent naître, et le monde est un tel paradoxe, une mystérieuse somme de contraires et d'énigmes, ou, comme l'ont senti ou pensé certains, il est peut-être effectivement une énorme erreur, un monstrueux, un infini délire. Ce n'est pas une Conscience et une Connaissance absolues, mais une Inconscience et une Ignorance absolues qui seraient alors l'origine d'un tel univers. Tout peut être vrai dans un tel cosmos : tout peut avoir surgi de rien ; le mental pensant n'est peut-être qu'une maladie de la Force sans pensée ou de la Matière inconsciente; l'ordre dominant, que. nous supposons être l'existence selon la vérité des choses, est peut-être en réalité la loi mécanique d'une éternelle ignorance de soi et non l'évolution d'une suprême Volonté consciente qui se gouverne elle-même ; l'existence perpétuelle est peut-être le phénomène constant d'un Néant éternel. Toutes les opinions sur les origines des choses assument une force égale, puisque toutes sont également valables, ou non valables ; toutes sont également possibles, dès lors qu'il n'y a pas de point de départ certain, ni de but vérifiable aux révolutions du devenir. Toutes les opinions ont été soutenues par le mental humain et toutes ont porté quelque fruit, même si nous les considérons comme des erreurs; les erreurs, en effet, sont permises au mental parce qu'elles ouvrent des portes sur la vérité, d'une façon négative en détruisant des erreurs opposées, d'une façon positive en préparant un élément dans une nouvelle hypothèse constructive. Mais, poussée trop loin, cette vision des choses conduit à nier tout le but de la philosophie, qui recherche la connaissance et non le chaos et qui ne peut s'accomplir si le dernier mot de la connaissance est l'Inconnaissable, mais seulement si c'est quelque chose qui fait que " cela étant connu, tout est connu ", comme dit l'Upanishad. L'Inconnaissable — qui n'est pas absolument inconnaissable mais au-delà de la connaissance mentale — ne peut être qu'un degré supérieur dans l'intensité d'être de ce Quelque Chose, un degré au-delà du plus haut sommet accessible aux êtres mentaux, et si l'on pouvait le connaître comme

Page 609


il doit se connaître lui-même, cette découverte ne détruirait pas entièrement ce que nous donne notre connaissance la plus haute possible, mais la porterait plutôt à un accomplissement plus élevé et à une vérité plus vaste de ce qu'elle a déjà acquis par la vision et l'expérience de soi. C'est donc ce Quelque Chose — un absolu qui peut être connu de telle sorte que toutes les vérités peuvent tenir en lui et par lui et se réconcilier — que nous devons découvrir comme point de départ et conserver comme base permanente de notre pensée et de notre vision, et qui nous permettra de trouver une solution au problème, car Cela seul détient la clef des paradoxes de l'univers.

Comme le Védânta le souligné et comme nous l'avons souligné tout au long, ce Quelque Chose, en sa nature manifeste, est Satchidânanda, une trinité d'existence, de conscience et de béatitude absolues. C'est de cette vérité première qu'il nous faut partir pour aborder le problème. Il est donc évident que la solution doit se trouver dans une action de la conscience qui se manifeste comme connaissance et cependant limite cette connaissance de façon à créer le phénomène de l'Ignorance — et puisque l'Ignorance est un phénomène de l'action dynamique de la Force de la Conscience, non un fait essentiel mais une création, une conséquence de cette action, c'est cet aspect de Force de la Conscience qu'il serait fructueux d'examiner. En sa nature, la conscience absolue est pouvoir absolu. La nature de Chit est Shakti : l'univers a été créé par la Force ou Shakti concentrée et dynamisée pour la cognition où pour l'action dans un pouvoir réalisateur effectif ou créateur ; et le pouvoir de l'être conscient absorbé en lui-même fait émerger, par la chaleur de son incubation¹ en quelque sorte, la semence et le développement de tout ce qui se trouve en lui ou, pour employer un langage plus accessible à notre mental, de toutes ses vérités et potentialités. Si nous examinons notre propre conscience, nous verrons que ce pouvoir de son

¹Tapas signifie littéralement chaleur; il a ensuite le sens d'énergie, d'ascèse, d'austérité de la force consciente agissant sur elle-même ou sur son objet. Le monde a été créé par Tapas sous la forme d'un œuf, pour reprendre l'ancienne image; de cet œuf brisé par Tapas, le feu d'incubation de la force consciente, le Purusha émerge, tel un oiseau. Notons que le mot " penance " (" pénitence "), qui, dans les ouvrages de langue anglaise, traduit en général le mot tapasyâ, est trompeur : l'idée de pénitence entre rarement dans les austérités pratiquées par les ascètes indiens, et la mortification du corps ne constituait pas non plus l'essence de ces pratiques, même sous leurs formes les plus extrêmes. Le but était plutôt d'échapper à l'emprise de la nature corporelle sur la conscience, ou d'insuffler à celle-ci et à la volonté une énergie supranormale, afin 'd'atteindre un objectif spirituel ou autre.

Page 610


énergie s'appliquant à son objet est réellement la force dynamique la plus positive qu'elle possède; c'est par ce pouvoir qu'elle acquiert toute sa connaissance, toute son action et toute sa création. Mais pour nous, il y a deux objets sur lesquels le dynamisme intérieur peut agir : nous-mêmes, le monde intérieur, et les autres — créatures ou choses —, le monde extérieur, autour de nous. Cette distinction et ses conséquences effectives et efficientes ne s'appliquent pas à Satchidânanda comme à nous, car tout est lui et en lui, et il n'y a pas ici de divisions, comme celles que peut créer notre mental limité. En second lieu, seule une partie de la force ;de notre être s'identifie en nous à notre action volontaire, à notre volonté engagée dans une activité mentale ou autre. Pour notre conscience mentale superficielle, le reste est involontaire en son action, ou subconscient, ou supraconscient, et de cette division aussi découlent un grand nombre de conséquences pratiques importantes. Mais dans Satchidânanda, cette division et ses conséquences ne s'appliquent pas non plus, puisque tout est son moi unique et indivisible, et que toute action et tout résultat sont les mouvements de sa volonté unique et indivisible, de sa conscience-force en ses opérations dynamiques. L'action de sa conscience et la nôtre ont une même nature, le Tapas, mais c'est le Tapas intégral d'une conscience intégrale dans une Existence indivisible.

Une question, pourtant, peut alors se poser : puisqu'il y a passivité autant qu'activité dans l'Existence et la Nature, état d'immobilité autant que kinesis, quels sont la place et le rôle de cette Force, de ce pouvoir et de sa concentration par rapport à un état où il n'y a aucun jeu d'énergie, où tout est immobile ? En nous, nous associons d'ordinaire notre Tapas, notre force consciente, à la conscience active, à l'énergie en jeu qui agit et se meut intérieurement ou extérieurement. Ce qui est passif en nous ne produit aucune action, ou seulement une action involontaire ou mécanique, et nous ne l'associons pas à notre volonté ou à notre force consciente ; cependant, puisque là aussi une action peut se produire ou une activité, automatique émerger, il faut qu'il y ait au moins, dans, cet .état, une force consciente qui réponde passivement ou automatiquement, ou ce peut être un Tapas, soit secrètement positif, soit négatif et inverse. Il se peut aussi qu'il y ait dans notre être une force consciente, une puissance, une volonté plus vastes, inconnues de nous, derrière cette action involontaire — sinon une volonté, du moins une certaine force qui engendre elle-même l'action ou bien répond aux contacts, aux suggestions, aux stimulations de l'Énergie universelle. Nous savons que, dans la Nature

Page 611


aussi, les choses stables, inertes ou passives sont néanmoins maintenues dans leur énergie par un mouvement secret et ininterrompu, une énergie en action soutenant l'immobilité apparente. Là aussi, par conséquent, tout est dû à la présence de la Shakti, à l'action de son pouvoir concentré, à son Tapas. Mais au-delà — au-delà de cet aspect relatif, de ce rapport entre état statique et kinesis —, nous découvrons que nous avons le pouvoir d'arriver à ce qui nous semble être une passivité ou une immobilité absolues de notre conscience où cesse toute activité mentale et physique. Il y aurait dès lors une conscience active, en laquelle la conscience agit en tant qu'énergie projetant connaissance et activité hors d'elle-même, et qui est caractérisée par le Tapas, et une conscience passive en laquelle la conscience n'agit pas comme énergie, mais existe simplement comme un état, et qui est donc caractérisée par l'absence de Tapas ou force en action. L'apparente absence de Tapas dans cet état est-elle réelle, ou une distinction effective de ce genre existe-t-elle en Satchidânanda ? On affirme que oui : l'état duel du Brahman — repos et création —, est en vérité l'une des distinctions les plus importantes et les plus fécondes de la philosophie indienne ; c'est en outre, un fait de l'expérience spirituelle.

Maintenant, il nous faut, en premier lieu, noter que cette passivité intérieure nous conduit d'une connaissance particulière et fragmentée à une connaissance plus grande, une et unificatrice, et, en second lieu, que si, dans l'état de passivité, nous nous ouvrons entièrement à ce qui est au-delà, nous pouvons prendre conscience d'un Pouvoir qui agit sur nous et sentir qu'il n'est pas nôtre dans un sens égoïste et limité, mais qu'il est universel ou transcendantal, et que ce Pouvoir œuvre par notre intermédiaire en vue d'un plus grand jeu de la Connaissance, un plus grand jeu de l'énergie, de l'action et des résultats dont nous sentons aussi qu'ils appartiennent, non point à nous mais au Divin, à Satchidânanda, et que nous n'en sommes que le champ ou le canal. Dans les deux cas, le résultat se produit parce que notre conscience individuelle se repose de son action ignorante et limitée et s'ouvre au suprême état statique ou à l'action suprême. Dans le second cas, celui de l'ouverture la plus dynamique, il y a un pouvoir et un jeu de la connaissance et de l'action, et cela, c'est Tapas; mais dans le premier aussi, dans la conscience statique, il y a évidemment un pouvoir de connaissance et une concentration de connaissance, ou tout au moins une concentration de conscience dans l'immobilité et une réalisation de soi, et cela aussi est

Page 612


Tapas. Dès lors, il semblerait que le Tapas, la concentration du pouvoir de la conscience, soit le caractère propre à la conscience passive aussi bien qu'à la conscience active du Brahman, et que notre propre passivité aussi ait le caractère d'un Tapas invisible, qui lui sert de soutien et d'instrument. C'est une concentration d'énergie de la conscience qui, tant qu'elle dure, soutient toute création, toute action et toute kinesis ; mais c'est aussi une concentration du pouvoir de la conscience qui soutient intérieurement ou imprègne tout état, même la plus immobile passivité, même une immobilité infinie ou un silence éternel.

On peut dire cependant que ce sont en définitive deux choses différentes, comme l'indiquent leurs résultats opposés. En effet, recourir à la passivité du Brahman conduit à la cessation de cette existence, et le recours au Brahman actif, sa continuation. Mais là encore, notons que cette distinction naît d'un mouvement de l'âme individuelle passant d'une position à une autre, de la position de la conscience du Brahman dans le monde, où elle est un pivot de l'action universelle, à la position ou vers la position de la conscience du Brahman au-delà, où elle est un pouvoir de retenir l'énergie hors de l'action universelle. En outre, si c'est par l'énergie du Tapas que la force de l'être se répand dans l'action cosmique, c'est également par l'énergie du Tapas que s'accomplit le retrait de cette force d'être. La conscience passive du Brahman et sa conscience active ne sont pas deux choses différentes, contradictoires et incompatibles : elles sont la même conscience, la même énergie qui, à une extrémité", est dans un état de recueillement, et, à l'autre, se projette dans un mouvement de don de soi et de déploiement; d'un côté, l'immobilité d'un réservoir et, de l'autre, l'écoulement des eaux par ses canaux. En fait, derrière toute activité il y a, et il doit y avoir, un pouvoir d'être passif d'où elle émerge, qui la soutient et même, nous le voyons en fin de compte, la gouverne en secret sans être totalement identifié à elle — c'est-à-dire, en tout cas, sans se déverser entièrement dans l'action au point qu'il soit impossible de l'en distinguer. Pareille identification, qui entraîne un épuisement total, est impossible ; car il n'est pas d'action, si vaste soit-elle, qui épuise le pouvoir originel d'où elle provient, ne laissant rien derrière elle en réserve. Lorsque nous reprenons position dans notre être conscient, lorsque nous nous tenons en retrait de notre action et voyons comment elle s'accomplit, nous découvrons que c'est notre être tout entier qui se trouve derrière tout acte particulier ou toute somme d'activités, qu'il est passif dans le reste de son intégralité, actif

Page 613


dans sa distribution limitée d'énergie ; mais cette passivité n'est pas une inertie impuissante, c'est une position où l'énergie se tient en réserve, Une vérité analogue doit s'appliquer plus complètement encore à l'être conscient de l'Infini, dont le pouvoir, dans le silence de l'état statique comme dans la création, doit aussi être infini.

La question, pour le moment, n'est pas de savoir si la passivité d'où tout émerge est absolue ou seulement relative à l'action observable, en retrait de laquelle elle se tient. Il suffit de noter ceci : bien que nous fassions la distinction pour faciliter la tâche à notre mental, il n'y a pas un Brahman passif et un Brahman actif, mais un seul Brahman, une Existence qui garde Son Tapas en réserve dans ce que nous appelons passivité et se donne Elle-même dans ce que nous appelons Son activité. Aux fins de l'action, tels sont les deux pôles d'un être unique, ou un double pouvoir nécessaire à la création. L'action, en son circuit, part de ta rétention, et y reconduit probablement les énergies qui s'en sont écoulées pour les reprojeter en un nouveau circuit. La passivité du Brahman est le Tapas, la concentration de Son être absorbé en lui-même — une concentration recueillie de Son énergie immobile ; l'activité est le Tapa's de Son être, libérant ce qu'il contenait en cette incubation, le délivrant dans la mobilité et voyageant en un million de vagues d'action, encore absorbé en chacune au cours de son voyage et libérant en elles les vérités et les potentialités de l'être. Là aussi, il y a concentration de force, mais c'est une concentration multiple, que nous prenons pour une diffusion. En réalité, ce n'est pas une diffusion, mais un déploiement ; le Brahman ne projette pas Son énergie hors de Lui pour qu'elle soit perdue dans quelque vide extérieur irréel, mais la garde active au-dedans de Soin être,où elle n'est ni fragmentée, ni diminuée au cours de tout le processus continuel de conservation et de transmutation. La passivité est une grande conservation de Shakti, de Tapas, soutenant une multiple mise eh mouvement et une transmutation en formes et en événements ; l'activité est une conservation de Shakti, de Tapas, dans le mouvement et la transmutation. En le Brahman comme en nous-mêmes, elles existent l'une par rapport à l'autre et coexistent simultanément, étant les deux pôles de l'action d'une Existence unique.

La Réalité n'est donc ni une éternelle passivité de l'Être immobile, ni une éternelle activité de l'Être en mouvement, ni une alternance des deux, dans le temps. Aucune n'est en fait la seule vérité absolue de la

Page 614


réalité du Brahman ; leur opposition n'est vraie pour Lui que par rapport aux activités de Sa conscience. Quand nous percevons le déploiement de l'énergie consciente de Son être dans l'action universelle, nous L'appelons le Brahman actif mobile ; quand nous percevons la rétention simultanée de l'énergie consciente de Son être, retirée de l'action, nous L'appelons le Brahman passif immobile — Saguna et Nirguna, Kshara et Akshara, autrement les termes n'auraient aucun sens ; car il y a une seule réalité 'et non pas deux réalités indépendantes, l'une immobile, l'autre mobile. Dans la conception ordinaire de l'évolution de l'âme dans l'action, pravritti, et de son involution dans la passivité, nivritti, on suppose que dans l'action l'âme individuelle devient ignorante, non-consciente de son être passif, qui serait son être vrai et que dans la passivité elle finit par perdre toute conscience de son être actif, considéré comme son être faux ou seulement apparent. Mais c'est parce que, pour nous, ces deux mouvements se produisent alternativement, comme en notre sommeil et notre état de veille ; à l'état de veille, nous entrons dans la non-conscience de notre état de sommeil, et dans le sommeil, dans la non-conscience de notre être de veille. Toutefois, il en est ainsi parce que .seule une partie de notre être effectue ce mouvement alternatif et nous pensons à tort que nous sommes seulement cette existence partielle ; or nous pouvons découvrir, par une expérience psychologique plus profonde, qu'un être plus vaste, en nous, est parfaitement conscient de tout ce qui arrive, même en cet état qui, pour notre être partiel et superficiel, est une inconscience; il n'est limité ni par le sommeil ni par la veille. De même en est-il de nos rapports avec le Brahman, qui est notre être réel et intégral. Par ignorance, nous nous identifions à une conscience seulement partielle, mentale ou spirituelle-mentale en; sa nature, qui, du fait du mouvement, perd conscience de son moi statique; en cette partie de notre être, quand nous perdons le mouvement, nous perdons en même temps toute prise sur notre moi dynamique, car nous entrons dans la passivité; .Par une entière passivité, le mental s'endort ou entre en transe, ou bien trouve sa délivrance dans un silence spirituel; mais bien que ce soit une libération hors de l'ignorance de l'être partiel dans Je flux de son action, on l'obtient en revêtant une nescience lumineuse de la Réalité dynamique ou en s'en séparant lumineusement : l'être spirituel-mental demeure absorbé en un état d'existence statique, silencieux, essentiel et devient soit incapable de conscience active, ou bien répugne à toute activité; ce silence libérateur est un état par lequel l'âme passe en .son voyage vers. l'Absolu. Mais il y a un; plus grand

Page 615


accomplissement de notre être vrai et intégral où les aspects statique et dynamique du moi sont libérés et accomplis en Cela qui les soutient tous deux et qui n'est limité ni par l'action, ni par le silence.

Le Brahman, en effet, ne passe pas alternativement de la passivité à l'activité et de nouveau à la passivité par l'arrêt de Sa force d'être dynamique. Si telle était la vraie vérité de la Réalité intégrale, alors, tant que durerait l'univers, il n'existerait pas de Brahman passif, tout serait action, et si notre univers était dissous, il n'y aurait pas de Brahman actif, ce serait la fin de toute chose et un repos immobile. Mais tel n'est pas le cas, car nous pouvons devenir conscients d'une passivité éternelle et d'un calme concentré, pénétrant et soutenant toute l'activité cosmique et tout son multiple mouvement concentré, — ce qui ne pourrait être si, tant que se poursuit une activité quelconque, la passivité concentrée ne la soutenait et n'existait en elle. Le Brahman intégral jouit simultanément de la passivité et de l'activité et ne passe pas alternativement de l'une à l'autre comme d'un état de sommeil à un état de veille : seule une activité partielle en nous paraît le faire, et en nous identifiant à elle nous avons l'illusion de cette alternance de deux nesciences ; mais notre être vrai, notre être intégral n'est pas soumis à ces contraires et il n'a pas besoin de perdre conscience de son moi dynamique pour posséder son moi de silence. Lorsque nous atteignons à la connaissance intégrale et à la libération intégrale de l'âme et de la nature, délivrées des incapacités de l'être restreint, partiel et ignorant, nous aussi pouvons jouir simultanément de la passivité et de l'activité, dépasser ces deux pôles de l'universalité, n'être limités ni par l'un ni par l'autre de ces pouvoirs du Moi en sa relation ou son absence de relation avec la Nature.

Le Suprême, déclare la Gîta, dépasse et le moi immobile et l'être mobile ; même réunis, ils ne représentent pas tout ce qu'il est. Car de toute évidence, lorsque nous disons qu'il les possède simultanément, nous ne voulons pas dire qu'il soit la somme d'une passivité et d'une activité, un nombre entier constitué de ces deux fractions, passif aux trois quarts et actif dans le dernier quart de son existence. En ce cas, le Brahman pourrait être une somme de nesciences, dont les trois quarts passifs seraient non seulement indifférents à tout ce que fait la partie active, mais l'ignoreraient complètement, le quart actif étant tout à fait inconscient de la passivité et incapable de la posséder autrement qu'en arrêtant l'action. Et même, la somme Brahman pourrait s'avérer être

Page 616


quelque chose de bien différent de ses deux parties, quelque chose, pour ainsi dire, d'élevé et de distant, d'irresponsable, ignorant tout ce qu'une Maya mystique ferait obstinément, et, en même temps, s'abstiendrait rigoureusement de faire dans les deux parties de son existence à Lui. Cependant il est clair que le Brahman, l'Être suprême, doit être conscient et de la passivité et de l'activité, et les considérer non comme son être absolu, mais comme des termes opposés et néanmoins mutuellement satisfaisants de ses universalités. Il ne peut être vrai que le Brahman, par une éternelle passivité, soit inconscient et entièrement séparé de ses propres activités ; libre, il les contient en lui-même, les soutient par son éternel pouvoir de calme, les met en mouvement depuis l'éternel équilibre de son énergie. Il n'est pas vrai non plus que le Brahman, en son activité, soit inconscient ou séparé de sa passivité; omniprésent, il est là, soutenant l'action, la possédant toujours au cœur du mouvement, et il est éternellement calme, immobile, libre et bienheureux dans tout le tourbillon de ses énergies. Pas davantage ne peut-il, dans le silence ou dans l'action, être inconscient de son être absolu ; il sait que tout ce qu'il exprime par leur intermédiaire tire sa valeur et son pouvoir de la puissance de cette existence absolue. Si, dans notre expérience, il semble en être autrement, c'est parce que nous nous identifions avec un seul aspect et que, du fait de cet exclusivisme, nous ne pouvons nous ouvrir à la Réalité intégrale.

Il s'ensuit nécessairement un premier résultat important, déjà atteint à partir d'autres points de vue, à savoir que l'origine de l'existence de l'Ignorance et le point de départ de ses activités de division ne peuvent exister dans le Brahman absolu ou dans le Satchidânanda intégral. L'Ignorance n'appartient qu'à une action partielle de l'être avec laquelle nous nous identifions, tout comme dans le corps nous nous identifions avec cette conscience partielle et superficielle qui passe alternativement du sommeil à la veille: en fait, c'est cette identification écartant tout le reste de la Réalité à l'arrière-plan, qui est la cause constitutive de l'Ignorance. Et si l'Ignorance n'est ni un élément, ni un pouvoir propres à la nature absolue du Brahman ou à Son intégralité, il ne peut y avoir d'Ignorance originelle ou primordiale. La Maya, si elle est un pouvoir originel de la conscience de l'Éternel, ne peut elle-même être une ignorance ni, en aucune manière, s'apparenter à la nature de l'ignorance; elle doit être un pouvoir transcendant et universel de la connaissance de soi et de tout ; l'ignorance ne peut intervenir que comme mouvement

Page 617


mineur et subséquent, partiel et relatif. Est-elle donc quelque chose d'inhérent à la multiplicité des âmes ? Existe-t-elle dès que le Brahman se voit dans la multiplicité, et cette multiplicité se compose-t-elle d'une somme d'âmes dont chacune, en sa nature, est fractionnaire et séparée, en conscience, de toutes les autres, incapable de les percevoir autrement que comme des choses qui lui sont étrangères, rattachées tout au plus par la communication de corps à corps ou de mental à mental, mais incapables d'unité? Or, nous avons vu que c'est là seulement ce que nous semblons être dans la couche la plus superficielle de notre conscience, dans le mental extérieur et le physique; quand nous nous retirons dans une action plus subtile, plus profonde, plus vaste de notre conscience, nous constatons que les murs de séparation s'amincissent et qu'à la fin il n'y en a plus, qu'il n'y a plus d'Ignorance.

Le corps est le signe extérieur et l'assise la plus basse de la division apparente dont, en plongeant dans l'ignorance et la nescience de soi, la Nature fait un point de départ pour que l'âme individuelle recouvre l'unité, même au milieu des formes les plus exagérées de sa conscience multiple. Les. corps ne peuvent communiquer entre eux que par des moyens extérieurs et qu'à travers un gouffre d'extériorité ; ils ne peuvent se pénétrer mutuellement qu'en divisant le corps pénétré ou en profitant d'une brèche en lui, d'une division préexistante; ils ne peuvent s'unir qu'en se morcelant et en se dévorant, en s'avalant et en s'absorbant jusqu'à une assimilation, ou tout au plus une fusion où les deux formes disparaissent. Le mental aussi est entravé par les limitations du corps, lorsqu'il s'identifie à lui; mais en lui-même, il est plus subtil et deux mentais peuvent se pénétrer sans heurt ni division, peuvent échanger leur substance sans se blesser mutuellement, peuvent d'une certaine manière devenir une partie l'un de l'autre ; néanmoins, le mental a, lui aussi, sa forme propre qui tend à le séparer des autres et il est enclin à se fonder sur cette séparativité. Lorsque nous recouvrons la conscience de l'âme, les obstacles à l'unité diminuent et, pour finir, cessent entièrement d'exister. L'âme peut s'identifier à d'autres âmes en sa conscience, peut les contenir et y pénétrer, y être contenue elle-même, et réaliser son unité avec elles — pas dans un sommeil sans traits et indistinct, un Nirvana où toutes les distinctions et toutes les individualités de l'âme, du mental et du corps sont perdues, mais dans un état parfaitement éveillé où l'âme observe toutes les distinctions et en tient compte, mais les dépasse.

Page 618


L'ignorance .et la division auto-limitative ne sont donc pas insurmontables et inhérentes à la multiplicité des âmes, ne sont pas la nature même de la multiplicité du Brahman. De même qu'il est au-delà de la passivité et de l'activité, le Brahman transcende l'unité et la multiplicité. Il est un en soi, mais sans que son unité le limite ou exclue le pouvoir d'être multiple, comme il en est de l'unité séparée du corps et du mental ; il n'est pas le nombre entier, l'un mathématique, qui ne peut contenir la centaine, et lui est donc inférieur. Il contient la centaine, il est un dans chacun des cent. Un en lui-même, il est un dans le multiple et le multiple est un en lui. Autrement dit, le Brahman en l'unité de son Esprit est conscient de sa multiplicité d'âmes et, dans la conscience de ses âmes multiples, est conscient de l'unité de toutes. En chaque âme, lui, l'Esprit immanent, le Seigneur en chaque cœur, est conscient de son unicité. Le Jivâtman illuminé par lui, conscient de son unité avec l'Un, est également conscient de son unité avec le multiple. Notre conscience superficielle, identifiée avec le corps, avec la vie divisée et avec le mental diviseur, est ignorante ; mais elle aussi peut être illuminée et rendue consciente. La multiplicité n'est donc pas la cause nécessaire de l'ignorance.

Comme nous l'avons déjà dit, l'ignorance intervient à un stade ultérieur, comme mouvement ultérieur, quand le mental est séparé de sa base spirituelle et supramentale ; elle culmine dans cette vie terrestre où la conscience individuelle dans le multiple s'identifie, par le mental diviseur, avec la forme, qui est la seule base sûre de division. Mais qu'est-ce que la forme ? Elle est, ou du moins nous paraît être ici-bas, une formation d'énergie concentrée, un nœud de la force de la conscience en son mouvement, un nœud dont l'existence est maintenue par un perpétuel tourbillon d'activité; mais quelle que soit la vérité ou la réalité transcendante dont elle découle ou qu'elle exprime, elle n'est, en aucune partie d'elle-même dans la manifestation, durable ou éternelle. Elle n'est pas éternelle en son intégralité, ni en ses atomes constitutifs, car ils peuvent être désintégrés par la dissolution de ce nœud d'énergie dont l'action constante et concentrée est seule à pouvoir maintenir leur apparente stabilité. C'est par la concentration d'un mouvement de force de Tapas sur la forme, qui maintient cette forme en vie, que la base physique de la division est établie. Mais, comme nous l'avons vu, toutes choses dans l'activité sont une concentration d'un mouvement de force de Tapas sur son objet. Il faut donc chercher l'origine de l'Ignorance dans quelque concentration absorbée de Tapas, de la Force-Consciente

Page 619


en action, sur un mouvement séparé de la Force ; pour nous, cela prend l'apparence d'un mental s'identifiant au mouvement séparé et s'identifiant aussi, dans le mouvement, séparément avec chacune des formes qui en résultent. Ainsi se construit un mur séparateur qui, enfermant la conscience dans chaque forme, l'empêche de prendre conscience de son propre moi total, des autres consciences incarnées et de l'être universel. C'est ici que nous devons chercher le secret de l'ignorance apparente de l'être mental incarné, comme celui de la grande inconscience apparente de la Nature physique. Nous devons nous demander quelle est la nature de cette concentration absorbante, séparatrice et oublieuse de soi qui est l'obscur miracle de l'univers.

Page 620










Let us co-create the website.

Share your feedback. Help us improve. Or ask a question.

Image Description
Connect for updates